L’un des deux seuls films américains à avoir été nommés à plus d’une cérémonie des Oscars (quelques films internationaux ont également accompli cet exploit), Street Angel est le second projet de Frank Borzage à avoir comme tête d’affiche le duo Janet Gaynor-Charles Farrell (qui seront réunis pour un total de 12 films) après 7th Heaven, ce dernier qui vaudra à Borzage son premier de deux statuettes de meilleur réalisateur. Beaucoup de parallèles sont d’ailleurs à tracer entre les deux films. L’histoire est celle d’Angela (Gaynor) qui, devant se procurer des médicaments onéreux pour sa mère mourante, décide de se prostituer pour obtenir de l’argent. Elle se fait cependant arrêter et condamner à un an de prison, mais parvient à s’échapper. Elle se joint alors à un cirque, et, en tournée, elle fait la rencontre de Gino (Farrell), un peintre ambulant. Les deux tombent follement amoureux, mais le passé d’Angela reviendra la hanter.

Tout comme dans 7th Heaven, on se retrouve dans une situation d’amour impossible, ou du moins d’un amour qui est séparé par la guerre ou, ici, par l’emprisonnement d’Angela. Les histoires d’amour sont sensiblement bien étoffées, et lorsque la séparation – qui survient par une situation hors de leur contrôle – arrive, on est très empathique envers les personnages. Toutefois, Street Angel a la particularité de laisser le personnage de Gino dans l’ombre face au départ précipité d’Angela. Elle ne lui dit pas qu’elle doit se rendre en prison, car il porte très peu en estime les prostituées. Ce faisant, la cassure est déchirante pour Gino, et Angela tentera de le retrouver et de le reconquérir à sa sortie de prison.

Le film fonctionne en grande partie en raison du dynamisme du duo Gaynor-Farrell. L’actrice remportera d’ailleurs un Oscar pour sa performance (et pour 7th Heaven et Sunrise: A Song of Two Humans, fait particulier pour cette première cérémonie). On comprend pourquoi ils formeront l’un des couples cinématographiques les plus connus à leur époque. Leur chimie est palpable et transcende l’écran. Mais Street Angel possède également d’autres qualités, notamment au niveau des décors et du visuel général du film. L’histoire se déroulant à Naples, on a dû construire de nombreux et grandioses décors pour nous donner l’impression que le film s’y situe vraiment, et à ce chapitre c’est très réussi. De même, la fluidité dans le mouvement de caméra et les plans particulièrement esthétiques en font un film impressionnant. Borzage nous montre une histoire traitée des centaines de fois auparavant, mais parvient à nous la présenter de façon inventive et novatrice, rendant le tout très dynamique et prenant.

Street Angel est peut-être resté dans l’ombre de 7th Heaven à sa sortie, mais il n’en demeure pas moins un film très intéressant à visionner encore aujourd’hui. En plus de témoigner de l’âge d’or hollywoodien, il s’apprécie comme un film romantique efficace, qui ne réinvente pas le genre, mais qu’on ne peut s’empêcher de trouver très contemporain dans sa construction. Si les prochains films mettant en vedette le duo iconique ne connaîtront pas le même succès (critique, du moins), Street Angel demeure pertinent pour observer deux acteurs au sommet de leur art, ainsi qu’un réalisateur en parfait contrôle de ses moyens.

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