Two Arabian Knights. 1927. Directed by Lewis Milestone | MoMA

Longtemps considéré comme perdu, Two Arabian Knights a finalement été retrouvé dans les archives personnelles d’Howard Hughes à sa mort à la fin des années 1970. C’est en effet sa compagnie qui avait produit ce film, qui vaudra à Lewis Milestone son premier Oscar, et le seul récipiendaire dans la catégorie « Meilleur réalisateur, comédie » de l’histoire, catégorie qui disparaîtra dès la seconde cérémonie des Oscars. En compétition contre Ted Wilde pour Speedy (et The Circus de Chaplin, qui a finalement été disqualifié), on peut comprendre pourquoi l’Académie a récompensé Milestone (et le récompensera à nouveau deux ans plus tard pour All Quiet on the Western Front). S’éloignant des comédies burlesques de Chaplin et Lloyd, Milestone opte plutôt ici pour un film relativement ambitieux, alliant comédie légère, film de guerre et aventure.

Combattant au front lors de la Première Guerre mondiale, S. Dangerfield Phelps III (William Boyd) et le sergent Peter O’Gaffney (Louis Wolheim), deux soldats américains, sont pris dans une tranchée. Il savent qu’ils devront s’avouer vaincus devant l’armée allemande, ce qui pousse Phelps, qui entretient une rancœur envers le sergent, à instiguer une bataille. Ce qui devait arriver arriva, et les deux sont faits prisonniers dans un camp allemand. Se retrouvant dans la même piètre situation, les deux forgeront une amitié de fortune et tenteront de s’échapper du camp de prisonniers, avec succès. Toutefois, en raison de leur déguisement, ils se feront méprendre pour des prisonniers arabes, et devront joindre un groupe de prisonniers en direction de Constantinople (aujourd’hui Istanbul). Ils parviendront à fuir une fois de plus le contingent, mais se retrouveront bien malgré eux sur un navire lui aussi en direction de l’Arabie. C’est sur ce navire qu’ils font la connaissance de Mirza (Mary Astor), une jeune femme arabe promise à Shevket Ben Ali (Ian Keith). S’ensuivra une romance entre les deux soldats (principalement Phelps) et Mirza, qui culminera au sein de la capitale ottomane.

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Il faut admettre que l’aspect comique est relégué au second plan dans Two Arabian Knights, au profit de l’aventure. On est plus dans l’esprit d’un Jumanji: Welcome to the Jungle qu’une comédie slapstick. On remarque en fait que la comédie n’est qu’un prétexte pour un film d’aventure de grande ampleur, qui enchaîne les décors à un rythme soutenu. Des tranchées, on passe au camp de prisonnier, puis au navire et enfin à Constantinople (et le palais d’un émir). C’est difficile de ne pas voir ce film comme un tremplin pour Milestone, qui réalisera plus tard plusieurs films épiques comme All Quiet on the Western Front, Ocean’s Eleven (l’original) et Mutiny on the Bounty (malgré l’ingérence de Marlon Brando tout au long du tournage). Plusieurs plans démontrent de la qualité de metteur en scène du réalisateur. À titre d’exemple, on peut citer deux magnifiques points de vue dans la tranchée au début du film, tous deux brillamment orchestrés. Outre cela, Milestone doit coordonner de nombreux acteurs dans une multitude de décors, et son travail, sans être exceptionnel, est relativement plus complexe que pour une comédie traditionnelle. C’est probablement ce qui justifie qu’on l’ait préféré à Ted Wilde comme meilleur réalisateur.

Outre ces belles mises en scène, il faut avouer que le film, sans avoir mal vieilli, tombe souvent à plat. Les comédies sont souvent un produit de leur temps, et on le constate assez bien ici. Contrairement à Speedy ou The Circus, dont l’humour physique est pratiquement intemporel, ici la comédie est textuelle. L’humour n’est pas tant dans les situations plus que dans les dialogues, ce qui n’est évidemment pas optimal dans un film muet. Des deux protagonistes, c’est Louis Wolheim qui offre la meilleure performance, ou du moins la plus drôle. Il a véritablement le visage d’un acteur comique, comparativement à William Boyd qui se situe plus dans la catégorie des charmeurs. Leur dynamique est intéressante, surtout au début, mais plus le film avance et plus on passe d’une rivalité à une amitié, enlevant ainsi tout aspect comique de leur performance. La seconde moitié du film se concentre surtout sur la romance naissante entre Phelps et Mirza, ce qui fait que le film se situe plus dans la catégorie des comédies romantiques que des comédies pures.

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Vu aujourd’hui, il est difficile de préférer Two Arabian Knights aux autres films contre lequel il était en compétition aux Oscars. Il y a de quoi se mettre sous la dent, certes, mais pas suffisamment pour demeurer investi tout du long. On perd un peu d’intérêt au fil des situations, contrairement à Speedy qui, malgré ses quelques problèmes de rythme, nous accroche tout de même par la force de son personnage principal. Boyd et Wolheim font un travail admirable, mais ils n’ont pas le poids du film sur leurs épaules. C’est plutôt dans son ambiance étonnamment légère (aux vues des situations présentées) et dans ses ambitions que le film parvient a gagner quelques points, tout au plus. C’est un film qui s’apprécie bien quand on se passionne des vieux films des années 1920, mais qui n’a pas les éléments nécessaires pour passer à l’histoire.

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