The War with Grandpa
On a beaucoup entendu parler de la tumultueuse sortie de The New Mutants, qu’on a finalement pu voir cet été après de nombreux problèmes de production. Lorsqu’un film voit sa sortie repoussée (à l’extérieur d’un contexte de pandémie mondiale, entendons-nous), ce n’est habituellement pas bon signe. C’est ce qui s’est également produit avec The War with Grandpa, dont la sortie initiale, prévue en avril 2017, avait été repoussée en raison des allégations envers le producteur Harvey Weinstein. Prenant finalement l’affiche cet automne (dans un contexte tout aussi tumultueux), on comprend un peu la décision du studio de vouloir tout de même aller de l’avant avec la sortie alors que les salles de Montréal et de Québec sont fermées, privant ainsi le film de près de 80% de son auditoire. C’est une production que les studios voudront oublier le plus rapidement possible, et, heureusement, le public devrait lui aussi l’oublier dès sa première fin de semaine.
La prémisse de départ a un air de déjà-vu et repose sur bien peu. Le jeune Peter Decker (Oakes Fegley) apprend de sa mère Sally (Uma Thurman) que son grand-père Ed (Robert De Niro) doit venir habiter chez les Decker. Résultat : Peter doit céder sa chambre, qu’il apprécie tant (semble-t-il), et déménager au grenier « poussiéreux ». Alors que ce serait le rêve de tout enfant que d’avoir une gigantesque et charmante chambre au grenier (du moins, c’est celle qu’on nous présente ici), Peter est furieux, et déclare la guerre à son grand-père pour ravoir sa chambre. Après la signature d’une déclaration les engageant à ne pas causer de dommages collatéraux, le conflit s’ouvre donc entre les deux. Cette guerre prendra évidemment des proportions plus grandes que nature, et rapprochera au final nos deux protagonistes.
Robert De Niro a fait le saut vers les comédies à la fin des années 1990, et, s’il s’en est bien tiré au début (surtout avec les franchises Analyze This/That et Meet The Fockers), force est d’admettre que son étoile se tarit un peu plus ces dernières années (à l’exception de quelques films de David O’Russell et du récent The Irishman). Ce n’est évidemment pas ce film qui le remettra sur les rails du succès. Il semble avoir trouvé sa niche en tant que vieux grincheux relativement cynique, mais on le voit ici plus blasé que jamais. Il est pourtant joint de certains acteurs avec qui il a travaillé par le passé, soit Christopher Walken et Cheech Marin, mais la chimie n’opère jamais entre eux.
Ni entre eux, ni avec le jeune Fegley, d’ailleurs. En fait, le jeune acteur ne parvient jamais à nous faire croire que la perte de sa chambre lui tient vraiment à cœur. La faute peut lui être attribuable, tout autant qu’aux scénaristes du film, qui n’ont pas su trouver un point d’ancrage assez solide pour rendre crédible cette vendetta. Perdre sa chambre et se retrouver cochambreur avec sa petite sœur, ou alors dans une minuscule pièce du sous-sol, c’est une chose. Mais se retrouver au grenier (très stylé par ailleurs), un penthouse dont rêveraient la plupart des enfants, c’en est une autre. Outre cet accroc scénaristique, c’est vraiment l’interprétation de Fegley qui peine à nous convaincre. Il n’a jamais l’air fâché envers son grand-père, ce qui serait la moindre des choses quand on décide de partir en guerre. Il agit en fait comme si de rien n’était. On a plus l’impression que les deux se jouent des tours plutôt que de s’attaquer vraiment, bien que les situations aient des conséquences plus graves que celles de simples tours.
En fait, en plus de cette prémisse douteuse, le film tente de nous faire accepter le point de vue de Peter, mais on se retrouve bien vite à être empathique envers Ed. Il n’a en effet absolument rien fait pour mériter cette guerre ouverte, puisque c’est Sally qui lui a tout simplement dit de s’installer dans la chambre de Peter. Ed est de plus un grand-père des plus typiques, sans aucune véritable malice que le mal-être qu’il éprouve face à sa perte d’autonomie et son déménagement forcé chez sa fille. Malgré les coups que son petit-fils lui fait, il ne perd jamais son amour pour lui, et demeure presque toujours civilisé. On est donc bien loin d’un Home Alone, où là les motivations de chaque personnage sont très claires.
On pourrait s’étendre plus longuement sur tout ce qui fait défaut dans The War with Grandpa, mais au final le film ne le mérite pas. Après un départ somme toute acceptable, le film devient en quelque sorte une caricature des autres du même genre. Un conflit entre des vieux mésadaptés aux nouvelles réalités et des jeunes confiants et inexpérimentés donneront lieu à des situations assez classiques que vous êtes probablement capables de deviner sans même avoir vu le film. N’en dévoiler qu’une seule pourrait vous gâcher le peu de surprise que le réalisateur Tim Hill a à vous réserver. Le résultat est un film familial cliché avec très peu d’éclat, fondé sur une prémisse déficiente et mettant en vedette un De Niro sur le pilote automatique.