Cette critique a d’abord été publiée dans le journal Le Collectif. Pour consulter la critique originale, cliquez ici.

Depuis quelques années, on assiste à une résurgence du cinéma d’horreur, qui s’est accompagnée de quelques récits originaux (notamment les excellents Get Out, Hereditary, Us et Midsommar), mais surtout d’adaptations de récits du « maître de l’horreur » : Stephen King. Pas moins de 11 films ou séries télévisées basés sur ses romans ont été produits dans les deux dernières années seulement, dont les plus célèbres sont The Dark Tower, Pet Semetary, Doctor Sleep (la suite du Shining, attendue en novembre prochain), et bien évidemment les deux chapitres de la série It, réalisés par Andy Muschietti. Fort du succès du premier film (qui est le film d’horreur ayant fait le plus d’argent au box-office), It Chapter Two vient conclure efficacement la saga du clown Pennywise.

27 ans plus tard

Le récit s’ouvre avec la mort d’Adrian Mellon (interprété par nul autre que Xavier Dolan), un jeune homosexuel qui, après s’être fait attaquer par un groupe de jeunes homophobes, se retrouve dans les pattes de Pennywise, le clown tueur, qui revient 27 ans après les événements du premier film. Mike Hanlon (Isaiah Mustafa), le seul membre du club des Losers à être demeuré à Derry après toutes ces années, doit réunir à nouveau le club, conformément à un pacte qu’ils avaient fait à la fin du premier opus, pour mettre fin une fois pour toutes aux atrocités du clown. Seul hic : les expatriés de cette ville fictive du Maine ne semblent pas se souvenir des événements ayant marqué leur jeunesse. Ils devront s’unir et trouver une façon de combattre Pennywise ensemble.

Dès les premiers instants du film, on sent qu’on a affaire à un récit épique : d’une durée de 2h49, It Chapter Two entend prendre son temps et bien explorer chacun de ses personnages. Le club des Losers étant composé de sept membres, plusieurs trames narratives, interreliées ou non, doivent exposer les bases du récit avant de plonger pleinement dans la quête principale du film. Muschietti et le scénariste Gary Dauberman ont pris le pari (réussi) de s’éloigner de la trame narrative des romans de King, et de diviser le récit des personnages adolescents et adultes en deux films, alors que les romans se déroulent de façon saccadée avec des retours en arrière constants. Le rendu est beaucoup plus dynamique ainsi, et on s’attache beaucoup plus aux personnages de cette façon. Les deux téléfilms sortis en 1990 avaient opté pour une adaptation plus fidèle, mais le tout manquait cruellement de rythme. Cette fois, on ne retrouve pas cette problématique, ou du moins pas totalement.

En effet, la multiplicité des trames narratives crée une certaine lourdeur. Si on peut vivre avec une longue introduction qui retrace l’historique de chacun, par trois fois au cours du film les personnages se retrouvent séparés les uns des autres. On doit donc observer leurs perspectives différentes, ce qui ralentit considérablement le récit, bien que tous ces segments soient pertinents, heureusement.

Un beau mélange d’acteurs connus et méconnus

Les jeunes et talentueux interprètes du premier film sont de retour dans ce nouveau chapitre, bien qu’ils occupent une place beaucoup moins grande, cette fois. On a tout de même droit à quelques bons moments mettant en vedette Jaeden Martell (St. Vincent), Finn Wolfhard (Stranger Things) et Sophia Lillis (Sharp Objects), qui jouent respectivement les rôles de Bill, Richie et Beverly. Leur performance démontre encore une fois tout le talent de cette jeune relève. Ce sont toutefois la version adulte des personnages du premier film qui sont en avant-plan dans It Chapter Two. Leur version adulte joués par James McAvoy, Bill Hader et Jessica Chastain occupe une place centrale dans le récit. Toutefois, les autres acteurs interprétant les Losers, tous méconnus, leur rendent très bien la réplique. Mustafa (Mike), Jay Ryan (Ben) et surtout James Ransone (Eddie) tirent tous leur épingle du jeu dans cette vaste distribution.

En fait, si la chimie s’installe entre tous les personnages, ce sont Ransone et Hader qui volent la vedette, notamment parce que ce sont les personnages les plus humoristiques du groupe. Leur répartie est excellente, et on devrait assurément revoir Ransone dans d’autres films d’envergure sous peu (rappelons qu’il jouait un personnage tout aussi mémorable dans la saison 2 de The Wire). Et que dire de la performance de Bill Skarsgård dans le rôle de Pennywise, qui est effrayant à souhait. Le pari est réussi par Muschietti, qui aurait facilement pu ne choisir que des acteurs établis.

Quelques problèmes de ton et d’animation

Le film souffre cependant de quelques lacunes notables. Bien que la plupart des films d’horreur tentent d’ajouter un peu d’humour pour détendre l’atmosphère, on sent que le contraste est peut-être un peu trop grand dans ce second chapitre. Ransone et Hader s’avèrent être les personnages comiques du groupe (ce dernier interprétant d’ailleurs un humoriste), et se bornent à faire des blagues même lorsque la situation ne s’y prête pas (ou même lorsqu’il n’y a aucun public). À l’opposé, Mustafa est un brin trop sérieux. En fait, ce personnage ne semble pas avoir de personnalité, et il ne sert véritablement qu’à faire avancer le récit. Véritable encyclopédie ambulante, il relate le passé de Derry et les origines de Pennywise avec une précision déconcertante, et on peine à le trouver crédible. Lorsque réunis, les interactions entre ces personnages paraissent farfelues.

Un second problème concerne les effets spéciaux. Dans le premier opus de la série, les effets spéciaux laissaient particulièrement à désirer. Les « transformations » de Pennywise étaient particulièrement risibles, malgré un visuel qui dans l’ensemble était très stylé. Dans le second chapitre, on constate une amélioration notable de la qualité des effets spéciaux (qui s’explique par un budget de deux fois supérieur au film précédent), notamment dans l’animation de Pennywise, mais d’autres créatures sont piètrement modélisées. Le tout nous semble toutefois plus crédible que dans le premier chapitre de la franchise.

Et la suite dans tout ça?

Si le film ne connaîtra pas le même succès au box-office que le précédent, It Chapter Two est une très bonne conclusion de la saga de Stephen King. Bien que n’étant pas exempt de défaut, le film s’avère être très divertissant, en dépit des longueurs. La fin pourra être déstabilisante pour ceux et celles qui n’ont pas lu les romans, mais demeure toutefois nettement mieux rendue que dans la version de 1990. On ne peut qu’espérer que la série se termine en beauté, et que les studios ne décideront pas, en raison du succès de la franchise, d’en faire un spin-off ou une préquelle. Parfois, il faut savoir se retirer au sommet plutôt que de presser le citron à outrance.

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