Dans les années 1990, Fox et Rob Rich ont fait une tentative de vol armé dans une banque aux États-Unis afin d’avoir les fonds nécessaires pour démarrer un magasin de vêtements hip-hop. Alors que Fox a purgé une peine de quelques années, Rob est condamné à 60 ans de prison après qu’il refuse une entente qui lui aurait permis de servir douze ans. Fox doit donc élever ses six garçons seule dans l’attente de retrouver son mari et se bat chaque jour pour espérer voir sa peine se réduire et qu’il rentre enfin à la maison.

Dès le début de Time, on fait la rencontre de Fox alors qu’elle est enceinte de ses jumeaux Freedom et Justus (en hommage à une époque ou Fox et Rob étaient seuls contre tout). Tout au long du film, on retrouve la maman et les six fils à la fois lorsqu’ils étaient enfants et à l’âge adulte alors qu’ils poursuivent des études de plus haut niveau, ont des conjointes et arborent des barbes. Il y a définitivement une part de charme à voir les images de toutes ces années tournées par Fox elle-même, car elles rappelleront aisément des temps pas si lointains où tout le monde est devenu cinéaste amateur avec les caméscopes VHS. On voit ainsi des anniversaires, des spectacles scolaires ou des conférences auxquelles Fox est invitée à prendre la parole. Puis, au moment présent, on fait confiance à la réalisatrice afin de capter les images et nous présenter plutôt Fox au milieu d’une journée de travail chez un concessionnaire automobile, en préparation à une publicité télévisée ou encore – surtout – dans ses nombreux appels polis à divers employés de la cour où doit être rendu un jugement pour le prolongement ou la cessation de la peine de Rich.

Cela dit, le documentaire n’adresse jamais vraiment de front l’enjeu auquel il veut nous faire réfléchir. On devine qu’il est question de la trop longue peine de Rob pour le crime qu’il a commis il y a vingt ans, qui lui fera manquer la plus grande partie de la vie de ses enfants, qui, par ailleurs, surprennent à chaque nouvelle scène. À cet effet, on voit rapidement que Fox est une mère exceptionnelle qui a assurément réussi dans l’éducation de ses garçons. Après tout, elle était seule alors qu’ils sont six et lorsqu’on les entend s’exprimer sur des enjeux de société lors de débats ou étudier avec assiduité leurs cours, on est immédiatement touchés par la façon dont les enfants Rich ont grandi. La dynamique familiale est sans aucun doute le plus bel aspect du film. Alors pourquoi a-t-on de la difficulté à adhérer au propos suggéré?

Dans les années 1990, Fox et Rob Rich ont fait une tentative de vol armé dans une banque aux États-Unis afin d’avoir les fonds nécessaires pour démarrer un magasin de vêtements hip-hop. Qu’espéraient-ils qu’il allait se passer? Dans quel monde ce plan était-il voué au succès? On comprend pourquoi Fox veut faire réduire la peine de son mari, mais on ne peut pas totalement oublier que ce dernier a tiré des coups de feu lorsqu’il était dans la banque. Mais n’allez pas penser que c’est le documentaire qui nous l’apprend. Il faudra une recherche supplémentaire sur le cas pour le savoir.

Time nous présente donc un beau problème éthique. Certes, servir 60 ans est extrême, et on souhaite que Rob sorte de prison bientôt (le film porte surtout sur un nouveau jugement qui doit être rendu imminemment qui ferait sortir Rob après 20 ans plutôt que 60), mais on semble omettre quelques détails plutôt importants dans la narration, qui devient donc un témoignage romancé et amoureux de la femme du détenu. On ne mentionne jamais que Fox et Rob ont visité deux jurés lors du premier procès pour les soudoyer, et que Rob avait des antécédents, ce qui a probablement influencé le jugement des soixante ans de peine. On n’est pas dans la quête de justice d’un accusé innocent ici, on est plutôt dans la tentative de rédemption de la famille, sans toutefois savoir s’il y a une once de remords derrière le crime. L’argument principal devient qu’il est injuste de n’avoir que quatre heures de visites par mois et de se faire couper en pleine conversation téléphonique, mais il faut avouer que si le système carcéral était plus permissif envers une tentative de vol armé on aurait un autre problème sur les bras.

En fait, en attente de l’admission de Fox concernant le crime qui a mené son mari derrière les barreaux, on est totalement charmés par le film. Mais lorsqu’on apprend pourquoi Rob n’est pas là, quelque chose se rompt et il sera très difficile de retrouver l’envie de poursuivre le visionnement, car le propos nous paraît vide dès cet instant. Évidemment, tout documentaire qui se respecte prend position, mais dans ce cas-ci la position semble moins honnête et plus manipulatrice même que les portraits satiriques de Michael Moore. On salue certainement la grande force de Fox, mais on se désole devant autant de vice-cachés.

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