Eep (Emma Stone) est la fille adolescente d’une famille d’hommes des cavernes. Son père, Grug (Nicolas Cage), croit fermement que la meilleure façon de survivre à leur environnement hostile est de rester enfermé dans la grotte où ils habitent. Ainsi, la famille passe la plupart de ses jours et de ses nuits à l’abri de tout danger, mais aussi de toute aventure, et, selon Eep, de tout plaisir.

Tout change cependant quand Eep aperçoit un rayon de lumière provenant d’une source inconnue et décide de le chasser au milieu de la nuit. Elle rencontre ainsi Guy (Ryan Reynolds), un adolescent homme des cavernes également, mais qui semble nettement plus évolué qu’elle et sa famille, d’abord par son habillement, mais aussi car il a découvert le feu. Lorsque la caverne du clan est détruite par des éboulements, les membres suivent Guy jusqu’à « tomorrow« , l’endroit derrière les montagnes qui baigne dans le soleil. Pour y arriver, les Croods devront donc apprendre comment survivre sans la sécurité de la caverne, alors qu’ils ne cessaient de répéter jusqu’alors que la curiosité est la meilleure façon de mourir. Ça promet!

Les films d’animation sont devenus au fil des ans d’excellents divertissements pour toute la famille. Alors que les couleurs éclatantes et les situations comiques et exagérées plaisent beaucoup aux enfants, les messages cachés et la représentation d’éléments du quotidien réussissent à convaincre les parents également. The Croods fait les deux, et il le fait habilement. Dès le moment où on a quitté la caverne terne et brune, on se retrouve dans un monde hautement coloré où les animaux qu’on rencontre sont des composites improbables entre plusieurs espèces. Les couleurs ici sont extraordinaires, que l’on soit dans la jungle, dans les champs ou sur les plages. Et sur ces fonds colorés, certains éléments feront sourire, notamment quand on constate que les membres de la famille chassent leur nourriture comme s’ils jouaient une partie de football, ou quand ils prennent leur « photo » en se faisant écraser une pierre en plein visage, visage qu’ils ont d’abord marqué à la craie pour qu’ils soient, littéralement, estampés dans le roc.

L’environnement est donc tout à fait convaincant, et plait rapidement. Dans sa trame de fond, toutefois, The Croods a décidé d’explorer plutôt l’affrontement entre la tradition et la modernité, avec l’allégorie de la caverne de Platon en arrière-plan. En effet, il y a ici une vraie distinction entre la famille et Guy, qui représentent deux époques, deux mentalités, deux façons de faire. Si Grug est particulièrement réticent à sortir de sa caverne, parce qu’il craint pour sa sécurité et celle de sa famille, Guy, qui vit plutôt à l’extérieur, maîtrise le feu, se questionne sans cesse sur le sens de la vie, porte des pantalons (avec un singe qui lui sert de ceinture), chasse du gros gibier, sait nager, et, surtout, dort à la belle étoile. À cet effet, le film adresse de façon habile une question nettement plus profonde que les limites d’un film pour enfants. Vaut-il mieux vivre ou survivre? Assurer notre survie, jour après jour, en ne vivant aucune aventure, ou prendre quelques risques mais découvrir du même coup ce que cela signifie réellement de vivre?

À travers la philosophie qui se dégage de The Croods, on pourra être surpris en constatant qu’il n’y a pas vraiment d’antagoniste à la famille. C’est une idée tout aussi rafraîchissante que déstabilisante. En effet, le cinéma nous a habitués à voir des opposants qui nuisent à nos héros favoris. Ici, mis à part les animaux parfois effrayants de l’univers qui nous est présenté, aucun personnage ne viendra empêcher les Croods d’arriver à « tomorrow« . En fait, le seul obstacle au plaisir vient de la réticence de Grug quant aux innovations de Guy. Le film se concentre donc sur les aventures de la famille, ce qui n’est pas vraiment une mauvaise chose, car à travers les péripéties, les enfants suivront un cours d’histoire nettement accéléré, qui éveillera sans doute leur curiosité. Même si Grug ne cesse de répéter que la curiosité est dangereuse, on réalise assez rapidement qu’elle est plutôt génératrice d’opportunités, et ce n’est pas un hasard si les deux univers dépeints dans le film sont aussi contrastants.

En rétrospective, The Croods a presque tous les éléments d’un film réussi. On aimera particulièrement l’environnement coloré et imaginatif, très dynamique. Sans posséder la profondeur thématique et émotionnelle d’un Pixar, le film parvient toutefois à susciter la curiosité, et pour l’une des rares fois il est évident que les enfants vont y trouver leur compte. Ils seront assurément stimulés, même s’ils ne comprendront peut-être pas tous ses éléments comiques (les blagues répétées sur la mort de la belle-mère, par exemple). Nous n’avons pas besoin de toujours se faire présenter un concept, parfois, des bonnes scènes d’aventure suffisent, même si certains verront en elles du remplissage visuel.

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