Paris Stalingrad' review | Hollywood Reporter

Cette critique a été rédigée dans le cadre de l’édition 2020 du Festival cinéma du monde de Sherbrooke.

Le documentaire Paris Stalingrad s’attaque à un enjeu qui divise l’Europe en ce moment : la crise migratoire. Les réalisateurs Hind Meddeb et Thim Naccache ont voulu, presqu’à la façon du cinéma direct qui a fait la renommée des cinéastes québécois dans les années 1960, mettre en images les camps de fortune des migrants à Paris, plus précisément près de la station de métro Stalingrad. Ce qui se voulait une représentation sensible de la crise migratoire devient rapidement une étude de cas lorsque l’équipe fait la rencontre de Souleymane, 18 ans, réfugié du Darfour. Arrivé en France après un périple traumatisant de cinq longues années, la « ville lumière » dont il avait rêvé, loin de répondre à ses attentes, lui inflige de nouveaux défis.

En suivant Souleymane, le film retrace le parcours des migrants dans Paris : les campements de rue, les interminables files d’attente devant les administrations, les descentes de police et la mobilisation des habitants du quartier pour venir en aide aux réfugiés. La caméra témoigne d’une métamorphose d’une ville et nous montre l’émergence de nouvelles frontières intérieures : des kilomètres de grillages pour rendre inaccessibles les allées sous le pont du métro aérien, des pierres pour empêcher les migrants de s’allonger, des rondes de vigiles pour les déloger, etc. On est ici plus dans la représentation que dans la revendication, quoi qu’il soit difficile de ne pas s’indigner devant l’administration française dans ce cas-ci.

Paris-Stalingrad · A feature documentary directed by Hind Meddeb.

En effet, ce qui frappe est l’enfer bureaucratique dans lequel les demandeurs d’asile sont plongés. Le film m’a beaucoup fait réfléchir à la notion de frontières et à la fermeture qu’ont certains gouvernements envers les immigrants. Pourquoi s’oppose-t-on si vertement à l’arrivée de réfugiés alors que les gouvernements s’alarment d’une pénurie de main d’oeuvre? Est-ce seulement pour des raisons économiques qu’on leur rend la vie difficile, ou si on constate plutôt un racisme systémique intrinsèque? Le film n’apporte pas les conclusions voulues, mais nous pouvons relier les points nous-mêmes. 

J’ai trouvé Paris Stalingrad très poignant. Rarement a-t-on accès à des images sur le terrain, ne serait-ce que par les bulletins de nouvelles qui observent le tout d’un peu plus loin. Je crois qu’il est un pas dans la bonne direction pour faire avancer le débat sur la crise migratoire, tout en nous invitant à penser différemment le problème. Et si on s’interrogeait sur les causes qui poussent des milliers de personnes à fuir leur pays d’origine et sur les actions à prendre pour régler les conflits politiques dans ces pays plutôt que de déplorer le fait qu’ils viennent se réfugier dans les pays industrialisés? Il faudrait plutôt régler la source du problème plutôt que d’imposer aux victimes de répressions de nouvelles problématiques qui pour nous seraient insoutenables, mais que les migrants préfèrent tout de même plutôt que de retourner dans les conditions misérables qu’ils ont quittées. Il y a un problème plus profond encore auquel il faut s’attaquer de toute urgence, car sinon il entraînera de nouvelles problématiques aux conséquences potentiellement plus grandes. 

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