De Gaulle
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, il y a surprenamment peu de films qui ont été consacrés à Charles De Gaulle. Pour aborder sa vie, on a plus souvent qu’autrement favorisé des séries télévisées ou des documentaires, car force est d’admettre que la vie du général et ex-président de la République est haute en rebondissements. Gabriel Le Bomin, plutôt que de se risquer à traiter de tous les aspects de sa carrière, décide de s’intéresser à un moment charnière de sa vie : son exil à Londres en juin 1940. Offrant un portrait intimiste et à hauteur d’homme du militaire français, Le Bomin ne parvient toutefois pas à pleinement se détacher de la figure politique de De Gaulle.
L’histoire débute en mai 1940. On retrouve De Gaulle (Lambert Wilson) alité avec sa femme Yvonne (Isabelle Carré) dans leur maison de campagne. On le voit ensuite à table avec sa famille, tout juste avant qu’il ne doive quitter pour le front. Après des adieux déchirants, nous nous retrouvons au cœur d’un champ de bataille où les Français peinent à offrir une résistance. La guerre s’intensifie, l’armée française s’effondre, et les Allemands seront bientôt à Paris. La panique gagne le gouvernement qui envisage d’accepter la défaite. Fraîchement promu au rang de général, De Gaulle veut infléchir le cours de l’Histoire. On l’envoie donc à Londres pour obtenir de l’aide du gouvernement britannique de Churchill (Tim Hudson), mais ses efforts de résistance seront rapidement décriés par les autorités françaises, qui iront même jusqu’à le pousser à l’exil, le condamnant à mort et lui retirant sa citoyenneté. En parallèle, on suit Yvonne et ses enfants qui se lancent sur les routes de l’exode.
Les intentions de Le Bomin sont claires. Il tente vraiment d’infuser une certaine humanité à ce personnage mythique de l’histoire française. Sans verser dans l’hagiographie, il veut rappeler que De Gaulle était avant tout un mari et père de famille aimant. On peut l’observer dans quelques retours en arrière qui abordent la naissance d’Anne (Clémence Hittin), sa fille trisomique, ou encore dans les rares échanges de courrier entre lui et Yvonne. Entre deux discours politiques, il ne cesse de s’enquérir de la situation de sa femme, en exode en quelque part en France. On va donc au-delà des représentations typiques des grands hommes militaires. Et pourtant…
Pourtant, Le Bomin ne parvient pas à suffisamment se détacher du Charles De Gaulle représenté dans les livres d’histoire. Entre deux moments plus intimistes, on tombe en effet dans un traitement assez académique du début de l’occupation allemande. Chaque dialogue semble sorti d’un livre sur la Deuxième Guerre mondiale, ce qui n’est pas nécessairement mauvais, mais qui rend le tout parfois assommant. Certes, on a droit à quelques confrontations intéressantes entre le Maréchal Pétain (Philippe Laudenbach) et lui, ou encore des scènes avec Paul Reynaud (Olivier Gourmet). Toutefois, sauf pour les passionné.e.s d’histoire, ces moments pourraient vous faire décrocher du film.
Les interprétations de Lambert Wilson et d’Isabelle Carré sont une grande partie de ce qui fait de De Gaulle un bon film. Bien qu’on ne les voie rarement ensemble, ils parviennent à soutenir leur trame narrative respective avec brio. Wilson, dont la ressemblance avec De Gaulle est frappante, alterne entre dialogues poignants et discours patriotiques avec fluidité et passion. Il incarne avec stoïcisme le général français, et c’est pour le mieux. Carré est également très efficace, elle qui demeure sans cesse sur le qui-vive tout en se voulant protectrice de la jeune Anne. On aurait peut-être souhaité que son personnage soit davantage approfondi, car après tout le titre du film ne fait pas référence uniquement à Charles, mais bien aux De Gaulle.
Ce film ne plaira pas à tout le monde. Il est conçu pour ceux qui se passionnent de films historiques de guerre. Ses quelques portions dramatiques ne suffiront pas à attirer un public plus friand de drames ou de films biographiques, malheureusement. Quoi qu’il en soit, De Gaulle pourra vous en apprendre un peu plus sur ce qui a fait de lui un grand chef politique, mais également un grand homme. La résilience dont il fait preuve en temps de crise vous fera réaliser pourquoi il occupe une place privilégiée dans l’histoire française, nous qui ne le connaissons au Québec surtout en raison de son fameux discours tenu à Montréal en 1967.
Les images sont une courtoisie d’AZ Films.