Greta Gerwig nous revient cette année avec son nouveau projet, une adaptation au goût du jour de Little Women, roman de Louisa May Alcott. Elle confirme par le fait même ses talents derrière la caméra, talents qui ont été exposés au grand jour en 2017 avec Lady Bird. Renouant avec plusieurs acteurs et actrices de ce dernier, Gerwig réalise un film d’époque touchant et grandement pertinent.

Quatre sœurs, quatre aspirations, quatre destins

Le film raconte l’histoire de la famille Marsh, dont le père, ayant quitté en raison de la Guerre de Sécession, est absent. Quatre sœurs, leur mère et la gouvernante tiennent donc le fort durant l’absence prolongée du docteur Marsh. Le récit gravite surtout autour des sœurs, qui chacune entend mener sa vie comme elle le souhaite. Jo (Saoirse Ronan), la rebelle (pour l’époque), est une auteure dans l’âme et évite à tout prix de se marier. Meg (Emma Watson) aspire quant à elle s’établir et avoir des enfants. Enfin, Amy (Florence Pugh) et Beth (Eliza Scanlen) souhaitent devenir peintre et pianiste respectivement.

Le récit se déroule à deux époques différentes. Débutant dans la seconde moitié des années 1860, l’histoire retrace les sept années précédentes, alors que les quatre sœurs étaient réunies sous un même toit. Construit un peu à la façon d’un biopic, on met en confrontation les aspirations de chacune des sœurs avec ce qu’elles sont finalement devenues. Le tout est plus dynamique que dans le film de 1994, bien que cela amène certaines problématiques que nous exposerons plus bas.

Une relève prometteuse!

Le film repose sur les quatre sœurs Marsh, qui sont toutes interprétées à perfection. Ronan est splendide dans le rôle de Jo. Cette actrice brille tout simplement en tant que cadette de la famille. Ronan nous démontre une fois de plus l’étendue de ses talents, elle qui en est déjà à trois nominations aux Oscars (elle devrait en décrocher une nouvelle cette année). La jeune Florence Pugh brille également dans le rôle d’Amy. Un charisme se dégage d’elle, et on la déteste comme on l’aime. Le fragile équilibre entre relation tendue et amicale avec Jo est si bien joué qu’on ne peut qu’être empathique envers son personnage. Après le succès de Midsommar, parions qu’on reverra Pugh dans un autre rôle de premier plan sous peu. Les deux autres sœurs sont tout aussi bonnes, mais elles ont moins l’occasion de briller, malheureusement. Watson et Scanlen sont tout à fait convaincantes, mais leur performance est surtout rehaussée lorsque les quatre interagissent. La chimie qui se dégage du groupe est palpable, et on voudrait plus de scènes où elles sont toutes réunies.

La distribution secondaire fait également belle figure. Timothée Chalamet, toujours aussi splendide, livre à nouveau une performance sans faille, dans le rôle du bad boy attachant. Laura Dern, plus absente, incarne avec subtilité cette mère quasi-monoparentale devant s’occuper de quatre adolescentes. Chris Cooper est touchant dans sa relation « père-fille » avec Beth. Le seul bémol à apporter serait la présence de Bob Odenkirk, qu’on a surtout connu dans des rôles comiques. Le fait de le voir dans un personnage plus sérieux surprendra un auditoire qui est familier avec ses rôles précédents. Cela étant, nous n’avons rien à redire de sa performance.

Un montage difficile

Le principal reproche que nous apporterions à Little Women est son montage. Moins linéaire que le roman (ou que le film de 1994), les constants retours dans le temps brisent un peu le rythme. Il est également parfois difficile de déterminer si on se situe dans le présent ou dans le passé. Un effort est mis dans les couleurs, les coiffures et les costumes pour indiquer au spectateur à quelle époque on se situe, mais la transition entre une période et une autre est parfois trop directe, ou plutôt mal amenée. On comprend la raison derrière ces constants retours en arrière plus le récit avance, mais un certain manque de rigueur est constaté. On aurait dû penser à vieillir (ou rajeunir) les actrices d’une époque à l’autre.

Le film souffre également de plusieurs problèmes de raccords (continuité d’un plan à l’autre) qui, s’ils ne dérangeront pas la plupart des gens, seront considérablement agaçants auprès d’un œil averti. Ils se présentent sous plusieurs formes, que ce soit des objets n’étant pas au même endroit entre deux plans, ou encore des costumes qui ne sont pas comme ils étaient sur le plan précédent. Si on peut tolérer une faute ou deux, nous avons dénombré au moins quatre raccords déficients tout au long du film. C’est dommage, bien que cela n’agacera pas la grande majorité du public.

Outre ces bémols, il faut saluer le travail derrière les costumes et les décors du film. Tourné et se déroulant à Concord au Massachussetts, on est plongé dans une Amérique post-guerre civile dans laquelle la vie est difficile et les conditions souvent misérables. Cela étant, on suit essentiellement deux familles assez aisées, mais conscientes de leur statut privilégié. Les costumes sont particulièrement travaillés (une nomination aux Oscars est à prévoir), tout comme les coiffures et les maquillages. La couleur du film est également bien stylisée : chaude pour le passé, froide pour le présent, illustrant du même coup l’état d’esprit des protagonistes à chacune des époques. Bref, aucun souci technique majeur, si ce n’est du montage brouillon.

Verdict

Little Women est au final très agréable. C’est un film d’époque ni trop lourd ni trop sérieux, tout juste assez léger pour attirer un grand public, mais avec des thématiques et des dialogues pour plaire à un public plus niché. L’histoire, bien que sans surprise pour quiconque aura lu le roman, est tout de même bien travaillée, ajoutant un message féministe au goût du jour qui est le bienvenu. Toutefois, on ne sort pas du visionnement nécessairement marqué par ce film. Il y a quelques moments forts, certes, mais ce n’est pas un film qui nous reste en tête. On peut toutefois souligner l’excellent travail de Gerwig, parvenue à réaliser un excellent film qui se retrouvera aux Oscars (aux côtés de Marriage Story réalisé par son conjoint Noah Baumbach). Un film à voir!

Fait partie des 1001 films à voir.

2 commentaires

  1. […] celle-ci est aussi le point tournant du récit, et quel moment! Rappelant à certains égards Little Women, Meet Me in St. Louis est sans aucun doute une perle des années 1940 qu’il faut avoir vu au […]

  2. Coups de cœur de la rédaction – Ciné-Histoire sur décembre 21, 2020 à 8:11 am

    […] énormément plaisir dans son ton, son entrain, ses chansons et la solidarité féminine (à-la-Little-Women) des sœurs Smith. Puis j’ai rencontré Bing Cosby et Fred Astaire dans Holiday Inn, un film […]

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